Ce chiffre impressionnant n'est pas le fruit du hasard ! Depuis les années 1990, Stockholm mène une politique ambitieuse pro-vélo, pierre angulaire de sa stratégie de développement durable. Largement reconnue comme un leader mondial en la matière, la ville vise la neutralité climatique d'ici 2030 et à se passer des combustibles fossiles d'ici 2040. Pour y parvenir, même pendant les hivers enneigés, la ville de Stockholm utilise des données vélo pour comprendre comment les gens se déplacent, justifier des choix audacieux en matière d'infrastructures et suivre l'impact de chaque nouveau mètre de piste cyclable sur ses objectifs climatiques.
La ville a mis en place une stratégie efficace combinant transports publics, péage urbain, vélo, marche et électrification. Pour atteindre ces objectifs, Stockholm considère le vélo non seulement comme un mode de transport, mais aussi comme un outil stratégique pour la politique climatique et urbaine, soulignant que « le vélo peut contribuer au bien-être individuel, à une meilleure santé publique et à des avantages climatiques ».
À partir des années 1990, la capitale a commencé à mettre en œuvre son premier plan cyclable, qui a depuis évolué à travers de multiples itérations.
Le plan cyclable actuel comporte six axes prioritaires :
Pour les planificateurs et les décideurs, la réaffectation de l'espace des voitures aux vélos et aux piétons comporte toujours un risque politique et opérationnel. Et la question clé demeure : « Comment savoir quelles mesures sont efficaces pour atteindre la neutralité climatique, et comment s'assurer que 15 % de tous les trajets seront effectués à vélo aux heures de pointe d'ici 2030 ? »
C'est là que les données cyclables continues deviennent essentielles : elles permettent aux responsables de Stockholm de vérifier si les politiques telles que les péages urbains, les priorités d'entretien hivernal ou les projets de réaménagement urbain modifient réellement les comportements.
Pour répondre à ces questions, la ville s'est progressivement équipée de la plateforme de données Eco-Visio afin de comprendre les tendances et les comportements cyclables dans plus de 40 endroits clés de la ville.
Carte des compteurs de vélos existants à Stockholm
Sur les axes clés, des compteurs automatiques permanents montrent comment l'ajout de pistes cyclables sécurisées et connectées est associé à une augmentation de 66 % du trafic vélo dans le centre-ville sur une période de dix ans (source : Plan d'urbanisme de Stockholm, avril 2025).
Les itinéraires à grande capacité reliant les banlieues au centre-ville sont surveillés afin de confirmer qu'ils sont largement utilisés pour les trajets quotidiens et pas seulement pour les loisirs.
Le graphique ci-dessous montre des pics évidents le matin et l'après-midi, indiquant que le réseau d'itinéraires à grande capacité est largement utilisé pour les trajets domicile-travail.
Profil horaire des principaux sites de comptage des autoroutes cyclables (20 sites)
Afin de favoriser la pratique du vélo tout au long de l'année, Stockholm accorde une priorité élevée à l'entretien hivernal des pistes cyclables sur ses 260 km de voies cyclables grâce à la méthode « sopsaltning » (brossage et salage), qui consiste à brosser la neige.
Comme le montre le graphique ci-dessous, qui présente le trafic moyen par heure sur une année complète (janvier 2024 → janvier 2025), cette méthode a un impact considérable. Le trafic cycliste moyen reste très élevé, même en hiver ! (À titre de référence, Montréal affiche une baisse beaucoup plus importante du vélo en hiver, ce qui n'est pas surprenant compte tenu de la rigueur de ses hivers, mais cela permet de mettre les choses en perspective.)
Les données vélo sont également essentielles pour établir une corrélation avec les émissions de gaz à effet de serre et les bénéfices santé afin de montrer comment la mobilité active contribue à ces objectifs :
« Il est possible d'éviter environ 40 décès prématurés par an simplement en réduisant le niveau de pollution auquel la population de Stockholm est exposée », souligne dans une étude Peter Schantz, professeur à l'École suédoise des sciences du sport et de la santé, au Svenska Dagbladet.
Alors que la ville ne cesse de croître et d'améliorer son réseau d'infrastructures cyclables (les détails de tous les projets en cours sont disponibles ici : https://vaxer.stockholm/projekt/?typ=filter&fas=1%2C3&kategori=574&lista=85596&sida=1), les comptages de base du trafic cycliste constituent un point de départ pour mesurer les changements. Après la mise en œuvre, les volumes de cyclistes et de piétons avant/après, combinés aux indicateurs de vitesse et de sécurité, permettront à Stockholm de prouver que la réaffectation de l'espace des voitures aux personnes apporte les avantages promis en matière de mobilité, de sécurité et de qualité de vie. (Comme cela a été le cas dans des projets similaires tels que la rue Saint-Denis à Montréal et la transformation des quais de Seine à Paris, où le projet de transformation urbaine, malgré une forte résistance politique, a été un succès indéniable avec une augmentation spectaculaire de 212 % du trafic cycliste entre 2018 et 2025) !
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Stockholm montre que les données vélo sont un excellent indicateur pour mesurer les progrès réalisés d'année en année vers des objectifs de neutralité climatique et d'abandon des combustibles fossiles. Bien sûr, ce n'est qu'une pièce du puzzle, car le cyclisme fait partie d'un système intégré visant à décarboner la mobilité, au même titre que le fret léger, l'électrification, les péages urbains, etc. Mais cela reste une preuve concrète que les décisions prises fonctionnent et que les comportements changent.
Cela permet également de montrer qu'avec les mesures appropriées, le vélo en hiver peut être une option privilégiée par le plus grand nombre, et non par une minorité ! Disposer de données de comptage permanentes permet aux responsables de mesurer le taux de rétention du vélo en hiver (trafic cycliste moyen en hiver divisé par le trafic cycliste moyen en été) et de suivre les progrès d'une année sur l'autre.
Et même si avoir une vue d'ensemble d'un territoire est une très bonne idée, toute ville ou tout territoire peut commencer modestement avec quelques compteurs bien placés, puis utiliser les données pour justifier et étendre des transformations routières plus ambitieuses.
Sources:
https://www.thelocal.se/20150110/boosting-stockholm-cycle-commute-could-save-80-lives-report/
https://pub.nordregio.org/wp-2023-8-nordic-cycling-policy/sweden.html
https://www.oliverwymanforum.com/mobility/urban-mobility-readiness-index/stockholm.html
https://www.uitp.org/wp-content/uploads/sites/7/2025/04/Stockholm-City-Plan-eng.pdf